Le Rwandais Donald Kaberuka, président du Groupe de la BAD. PHOTO LE SOFT INTERNATIONAL.
Un Rwandais à Kinshasa MISE EN LIGNE LE 1ER AOÛT 2007 | LE SOFT INTERNATIONAL N°916 DATÉ 31 JUILLET. Il est Rwandais mais Dr. Donald Kaberuka se veut Africain. L’homme qui a fait du Rwanda un «petit Lion» vient aider notre pays à s’en sortir. L’ancien ministre rwandais des Finances et de la Planification Économique, élu Président du 1er groupe financier du Continent, était en visite à Kinshasa, un don à la main de 127 millions de dollars, qu’il a remis le 31 août au ministre des Finances r-dcongolais, Athanase Matenda Kyelu, en inaugurant son bureau, immeuble de la BCDC, boulevard du 30 juin. Ci-après l’interview en exclusivité accordée au «Soft International» par Dr. Donald Kaberuka peu avant qu’il n’embarque à Tunis, siège de la BAD, pour son voyage en Afrique Centrale.
Le Soft International. Comment justifiez-vous ce moment choisi par vous pour vous rendre en R-Congo?
Donald Kaberuka. Je suis l’évolution positive que connaît ce pays et je tenais à voir de quelle façon la BAD peut apporter une contribution significative. La Banque dispose d’un portefeuille de projets important dans divers secteurs d’activités de ce pays pour l’aider à lutter contre la pauvreté, à stimuler la relance nationale et le processus de reconstruction. Nous venons juste de mettre en œuvre notre nouvelle politique concernant les pays sortant de conflit, et je me réjouis à l’idée de rencontrer les pouvoirs publics congolais et de voir personnellement les progrès réalisés sur le terrain. J’ajoute qu’au cours de cette visite, j’aurais le plaisir d’inaugurer notre représentation à Kinshasa et de signer avec les autorités deux protocoles d’accord de dons d’un montant cumulé de 127 millions de dollars relatifs à deux projets récents dans le domaine de l’eau et de réinsertion socio-économique dans le cadre du programme DDR.
Lors de la campagne pour votre élection, vous avez mis le cap de la réforme de la BAD au-devant de vos objectifs et vouliez voir les pays s’approprier la BAD au plan national - aux pays de définir les plans et les priorités, non le contraire; la mise sur pied d’un partenariat stratégique; la diversification des instruments d’intervention - adaptation et sélectivité des instruments selon les besoins; et renforcement de la présence de la Banque sur le terrain. Où êtes-vous aujourd’hui avec ces projets? Nous avons réalisé des progrès sensibles sur tous les fronts. La Banque jouit d’une excellente situation, et les réformes se poursuivent selon le calendrier établi. Au cours des deux dernières années, nos opérations ont enregistré des résultats records. Nous avons renforcé la solidité financière de la Banque, qui continue de jouir de la notation de crédit la plus élevée possible. Nos opérations en faveur du secteur privé ont plus que triplé, dépassant le milliard de dollars en deux ans. Nous recentrons les activités de la Banque de façon à ce qu’elle augmente son appui au secteur des infrastructures, à savoir, les routes, l’énergie et l’eau. Nous avons redynamisé nos interventions en faveur des projets d’intégration régionale. Vous serez heureux d’apprendre, s’agissant de nos efforts à favoriser l’appropriation des projets par les pays concernés, que nous entendons décentraliser nos programmes en ouvrant jusqu’à vingt-cinq bureaux en Afrique, y compris celui de Kinshasa qui couvre la RDC et la République du Congo. Je précise que les réformes entreprises par la Banque visent à renforcer l’efficacité avec laquelle nous soutenons les priorités de nos pays.
Quel rôle va jouer votre représentation à Kinshasa? Nos bureaux extérieurs jouent un rôle déterminant dans les efforts de la Banque visant à renforcer l’efficacité de ses interventions. La RDC est un client très important pour la Banque. La BAD a participé de façon significative aux efforts de règlement de la dette du pays. Nous avons un portefeuille de projets en augmentation et les perspectives sont encourageantes. J’attends du nouveau bureau national en RDC qu’il contribue à l’amélioration de la performance de ce portefeuille, au renforcement de la coordination avec les autres bailleurs de fonds, et qu’il apporte une valeur ajoutée en termes de soutien aux efforts du Gouvernement.
Quels sont les secteurs clés d’intervention de la BAD à Kinshasa? Nous apportons un appui dans presque tous les secteurs, notamment l’appui budgétaire, l’infrastructure, l’agriculture, l’éducation, l’eau et l’assainissement et la réinsertion sociale, ainsi qu’au secteur de l’énergie, y compris Inga (ndlr, le barrage hydro-électrique géré par la Snél). Par ailleurs, nous explorons actuellement un certain nombre d’opportunités dans le secteur privé.
Les fonds sont-ils toujours décaissés? Sinon, pourquoi? Le taux de décaissement n’est pas aussi élevé que nous l’aurions souhaité. Mais, je reste confiant qu’avec l’ouverture de notre Représentation, l’on enregistrera une nette amélioration de la situation.
Le ministre des Finances de RDC, dans une interview au «Soft International» à la veille de votre visite déplore précisément la situation d’exécution des projets en RDC. Le montant total des projets financés par la BAD dans le pays s’élève à environ 440 millions de dollars américains depuis la reprise de la coopération en 2002. Cependant, la mise en œuvre des différents projets est rendue difficile suite à l’inadéquation avec la réalité actuelle et des contraintes d’ordre organisationnel. Que répondez-vous? Ce n’est pas un problème propre à la RDC. L’exécution des projets dans la plupart des pays sortant d’un conflit, tend à être problématique. Il y a des problèmes de capacité d’absorption nationale mais également parfois des problèmes de conception inadéquate. Une des raisons pour lesquelles j’effectue cette visite – comme je l’ai fait dans plusieurs autres pays – est de voir personnellement quels sont les défis et discuter des solutions possibles avec les autorités.
La Banque Mondiale a fait état de mauvaises opérations financières menées en RDC voire de détournements. Qu’en est-il exactement? Jusqu’ici, les interventions de la Banque ont été menées selon nos normes et standards. Aucune irrégularité n’a été portée à ma connaissance. Nous veillerons toujours à ce que les normes en matière de gestion soient observées.
Où en êtes-vous avec votre projet de ramener le siège de la BAD à Abidjan maintenant que la paix semble revenue? Nous reviendrons à Abidjan dès que les conditions seront réunies. Nous sommes encouragés par l’évolution positive de la situation dans le pays des derniers mois. Les actionnaires de la Banque examineront une nouvelle fois la question en avril 2008 pour évaluer la situation.
Vous avez toujours encouragé les pays de la sous-région à relancer la CEPGL. Que fait aujourd’hui la BAD dans ce sens? L’intégration régionale demeure une question cruciale pour l’Afrique. Elle est l’une des orientations majeures de notre nouvelle stratégie. 15% de notre programme de financement seront alloués à des programmes d’intégration régionale. Nous sommes disposés à venir en aide à la région. Sachez que la BAD apporte déjà son appui à plusieurs initiatives, notamment la gestion de l’écosystème et des bassins du fleuve Congo. La Banque a, par le passé, accordé un appui important à la CEPGL et si les Gouvernements de la région le demandent, nous serons heureux de nous joindre à eux.
Que pensez-vous du projet de création des États-Unis d’Afrique? Les discussions lors du Sommet de l’UA à Accra ont été très enrichissantes. Elles ont montré un large consensus sur le besoin urgent d’une intégration continentale et la nécessité d’y arriver par l’édification progressive de solides blocs régionaux.
Vu du banquier international et de fils d’Afrique, comment voyez-vous l’Afrique? De quoi a-t-elle besoin pour son développement? L’Afrique a aujourd’hui sa meilleure chance de croissance soutenue en trois décennies. Le Continent a vu six années consécutives de croissance économique supérieure à la croissance démographique. Un environnement extérieur favorable et les années des réformes économiques ont porté leurs fruits. Le nombre de conflits actifs a diminué. Nous devons toujours faire face aux défis en ce qui concerne la réduction des risques et des coûts de transactions. Nous devons améliorer nos infrastructures et soutenir les politiques crédibles qui nous permettent d’attirer l’investissement. Je crois en l’avenir à condition que nous soyons en mesure de maintenir la paix, la stabilité, l’élan des réformes économiques, et que la communauté internationale tiennent les promesses faites au Sommet de Gleaneagles, notamment concernant les négociations commerciales, le doublement de l’aide à l’ Afrique.
Où en est-on avec le projet du NEPAD?
La vision de l’Afrique - définie dans le cadre du NEPAD - reste plus que jamais valide. Je suis heureux qu’un nombre croissant de pays ait adhéré au mécanisme africain d’examen par les pairs. La Banque a une mission spéciale dans le cadre du NEPAD en particulier dans les secteurs financiers et de l’infrastructure. Nous restons très actifs dans ces secteurs; nous venons de consentir des investissements importants dans le Fonds panafricain pour le développement des infrastructures. T. MATOTU. | lesoftonline.net 01/08/2007 | |
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